Au Bénin, la lutte antidjihadiste fait craindre une stigmatisation accrue des Peuls

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La région est classée en « zone militaire », interdite aux journalistes. Cette partie septentrionale du Bénin dessine un arc de cercle allant des départements de l’Atacora au Borgou, en passant par l’Alibori. Sur la carte du ministère français des affaires étrangères, ce territoire tracé en rouge est « formellement déconseillé en raison d’activités possibles de groupes armés et du risque d’enlèvement ». Il comprend notamment les zones frontalières du Burkina Faso et du Niger, les parcs nationaux du W et de la Pendjari, ainsi que la frontière nord-est avec le Nigeria.

Le danger y est réel. « Depuis décembre 2021, le Bénin subit un nombre croissant d’attaques liées à des groupes extrémistes », explique Kars de Bruijne, chercheur spécialisé sur les conflits au sein de l’Institut néerlandais des relations internationales Clingendael et auteur d’un rapport paru en décembre : « Nous en avons recensé 43 entre décembre 2021 et septembre 2022. Ces groupes exploitent les tensions locales et promettent de résoudre les problèmes liés à l’accès aux ressources naturelles. »

Ils opèrent à partir du Burkina Faso, du Niger et, dans une moindre mesure, du Togo et du Nigeria. « Mais il existe de nombreuses preuves de l’émergence d’un djihad béninois et il serait dangereux de nier ou de sous-estimer sa présence », ajoute Kars de Bruijne.

Même si la situation s’est détériorée en 2022, un haut responsable de la sécurité du territoire, qui souhaite conserver l’anonymat, assure qu’elle reste « sous contrôle ». « Aujourd’hui, nous arrivons à contenir les attaques, même s’il est vrai qu’elles sont en augmentation, affirme-t-il. Nous n’avons pas laissé un mètre carré de territoire aux terroristes. » Selon lui, ces hommes auraient tous le même profil : « Assez jeunes, se déplaçant en permanence avec leur troupeau… Ils souhaitent la reconnaissance de leur identité culturelle. » Sans les nommer, il désigne les Peuls, un peuple majoritairement musulman établi à travers l’Afrique de l’Ouest.

Cette stigmatisation de la communauté peule semble avoir toujours existé dans le nord du Bénin, et ailleurs dans les pays de la sous-région, comme le Mali ou le Burkina Faso. Elle est principalement liée à leur mode de vie. « Comme ce sont des éleveurs nomades, les Peuls peuvent rarement suivre une scolarité complète, rappelle Seidou Boubé, président de l’association d’éleveurs Seho Suudu Baaba. Etant moins éduqués que les autres, ils n’ont jamais accès aux postes administratifs dans la justice ou la police. » Il leur est aussi difficile d’obtenir des documents officiels, à commencer par des actes de naissance, et d’être ainsi reconnus comme des citoyens à part entière.

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Lot atik