
Dans sa blouse bleue, l’air épuisé, une infirmière reçoit des blessés depuis plusieurs heures dans le centre de santé. « On nous tire dessus, lâche-t-elle, à bout. Que veut Boluarte ? Que veulent-ils de plus ? Ils ont déjà tué tellement de gens… » Dans les rues de Juliaca, dans la région de Puno (sud), ce lundi 9 janvier, les appels à l’aide se multiplient. Un monsieur, hagard, demande devant une caméra de l’aide pour les funérailles de son fils, qui vient de décéder à l’hôpital.
A plus de 1 000 kilomètres de distance, à Lima, la capitale, la présidente Dina Boluarte reste impassible, sourde au désarroi et aux revendications des manifestants. Ces derniers protestent dans la rue depuis la destitution du président Pedro Castillo, le 7 décembre, à la suite de sa tentative de coup d’Etat, et réclament la démission de la cheffe d’Etat et l’organisation immédiate de nouvelles élections. « Je ne comprends pas, que veulent-ils ? » s’interroge Mme Boluarte devant les caméras, tandis que la nouvelle d’une première victime mortelle à Juliaca lui parvient. La présidente est alors en pleine réunion de dialogue avec différentes forces politiques, censée trouver une issue à la crise. « Ce qu’ils [les protestataires] demandent est un prétexte pour générer le chaos », tranche-t-elle.
Dans les heures suivantes, c’est un bain de sang qui se produira à Juliaca, épicentre des manifestations depuis leur reprise après la trêve de Noël : au moins 17 morts et 70 blessés, ce 9 janvier. Dans des vidéos largement diffusées sur les réseaux sociaux, des hélicoptères survolent la ville et larguent des bombes lacrymogènes. Au sol, les forces de police tirent sur les manifestants. Selon les rapports médicaux, elles auraient visé la tête ou le corps. Certaines victimes sont touchées dans le dos. Parmi les personnes décédées, un étudiant en médecine de 31 ans qui portait secours aux blessés. Une adolescente aussi, âgée de 17 ans.
A Lima, le gouvernement justifie sa ligne répressive et nie toute exaction. Le premier ministre, Alberto Otarola, traite les manifestants de « hordes de délinquants ». Des mesures seront prises, annonce-t-il, pour contrer la mobilisation sociale présentée comme une tentative de « coup d’Etat » qui serait « financée par le narcotrafic » ou par « des intérêts extérieurs ». L’ex-président bolivien Evo Morales est interdit d’entrée sur le territoire, accusé de mener des activités prosélytes contre le gouvernement péruvien.
Mme Boluarte, qui ne doit son arrivée au pouvoir qu’à la destitution de M. Castillo, dont elle était la vice-présidente, apparaît dépassée, déconnectée de la population, parfois incohérente. Avocate de formation inconnue du grand public avant de faire carrière dans la fonction publique, elle n’avait aucune expérience politique avant l’élection de M. Castillo en juin 2021. Les analystes pointent l’improvisation qui règne dans son gouvernement.
Il vous reste 54.34% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
The post Au Pérou, la présidente Dina Boluarte mise en cause pour la violence de la répression policière appeared first on Haiti24.