
Où commence et où s’arrête le droit à la désobéissance civile ? Un tribunal peut-il reconnaître « l’état de nécessité écologique » ? Le procès contre des militants antibassines, qui s’est tenu à La Rochelle jeudi 5 janvier, avant un autre rendez-vous le lendemain au tribunal de Niort (Deux-Sèvres), a tourné au débat entre juristes.
<p class="article__paragraph ">Après la sortie spectaculaire – et infructueuse – en pleine audience, le 28 novembre 2022 au tribunal de Niort, de cinq prévenus qui avaient participé à la manifestation de Sainte-Soline un mois plus tôt, les opposants aux réserves d’eau à usage agricole n’ont pas manqué cette fois d’exprimer leurs arguments. Romain Rivière (31 ans) et Nathanaël Branco (28 ans) leur ont donné cette occasion. Ces deux soigneurs animaliers de formation étaient jugés pour avoir, le 6 novembre 2021, découpé au cutter et mis le feu à la bâche d’étanchéité d’une réserve à Cramchaban, au nord-est de la Charente-Maritime, à l’issue d’une manifestation. Ils ont été identifiés à la suite<em> « d’une longue enquête »</em> parmi une dizaine d’auteurs. L’un d’eux a également refusé de se soumettre à un prélèvement d’ADN.</p> <p class="article__paragraph ">Applaudis à leur entrée au tribunal par près de 200 militants du collectif Bassines non merci, parmi lesquels les députées LFI Clémence Guetté et Aurélie Trouvé, ils refusent de répondre aux questions des magistrats. Chacun justifie toutefois dans un discours les actions menées contre les bassines, selon eux, <em>« illégales » </em>de l’Association syndicale autorisée d’irrigation (ASAI) des Roches. La construction de cinq réserves, dont celle de Cramchaban, a, par deux fois, de 2009 à 2022, été annulée par le tribunal administratif de Poitiers, puis par la cour d’appel administrative de Bordeaux. Cela n’a pas empêché le groupe d’agriculteurs à l’origine du projet de les creuser, de les remplir et de les utiliser pour arroser les cultures.</p> <h2 class="article__sub-title">« Résistance passive »</h2> <p class="article__paragraph ">Appelée comme témoin, Cécile Guenon, ex-juriste de l’association Nature Environnement 17, indique que le matin même, le rapporteur public du Conseil d’Etat a conclu à l’inadmissibilité de l’exploitation des réserves, marquant pour elle<em> « la fin du feuilleton judiciaire ».</em></p> <p class="article__paragraph ">L’ASAI des Roches et la Coordination rurale, parties civiles dans cette affaire, ne sont du même avis. Leur avocate, M<sup>e</sup> Le Breton, conteste l’illégalité des bassines et assure qu’elles ont été <em>« légalement aménagées, sous la tutelle de l’Etat »</em> et <em>« toujours suivies par l’administration ».</em></p> <p class="article__paragraph "><em>« L’Etat ne fait pas grand-chose pour faire respecter ses propres règles », </em>lance l’avocat des militants, M<sup>e</sup> Huriet, qualifiant au passage l’ASAI d’<em>« association de malfaiteurs ». </em>De là, le débat sur le fond : un acte de sabotage est-il justifié si le bien dégradé n’est pas légal ? Pour le représentant du ministère public, Thierry May, <em>« l’état de nécessité ne peut pas faire litière de l’Etat de droit ».</em> Confiant qu’il n’aime pas le mot d’<em>« écoterroriste »,</em> employé par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, après les affrontements de Sainte-Soline, reconnaissant que les deux prévenus au casier vierge n’ont <em>« pas le profil de délinquants », </em>le magistrat fait néanmoins remarquer que la désobéissance civile s’appuie sur <em>« une résistance passive, non violente ». </em>Il n’a encore jamais vu non plus<em> « de positionnement scientifique tranché sur le système d’irrigation » </em>permettant de nier l’utilité des bassines.</p> <p><strong>Il vous reste 37.7% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.</strong></p>
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