
La séquence dure plus de vingt minutes, enregistrée discrètement par le membre d’un groupe de sept personnes interpellées, lundi 20 mars, à l’angle des rues des Minimes et du Béarn, dans le 3e arrondissement de Paris. Entre commentaires à caractère sexuel, gifles, menaces et vantardises, ce document sonore, que Le Monde a pu authentifier, jette une lumière crue sur le comportement de fonctionnaires en contradiction totale avec les règles déontologiques autant qu’avec la loi.
Ce soir-là, plusieurs dégradations ont été commises dans les environs au cours d’une nouvelle nuit de protestation contre le recours, jeudi 16 mars, à l’article 49.3 par le gouvernement pour faire adopter sans vote la réforme des retraites. Appelée pour procéder à des interpellations d’émeutiers, qui ont pris l’habitude, depuis plusieurs jours, de se disperser par petits groupes et d’incendier des poubelles – les affrontements directs avec les forces de l’ordre sont plutôt rares – une unité des brigades de répression de l’action violente motorisées (BRAV-M) parvient à appréhender une demi-douzaine de jeunes gens, sans qu’il soit permis d’établir, pour le moment, leur participation aux incidents.
Une photo, prise sur l’instant, montre une quinzaine de fonctionnaires, reconnaissables notamment à leurs casques de moto blancs, dans leur tenue habituelle qui emprunte autant à l’uniforme de « Robocop » des CRS qu’à l’équipement de n’importe quel motard. Cernant plusieurs jeunes assis sur le trottoir, le dos à la devanture d’un commerce désaffecté, plusieurs de ces fonctionnaires se laissent aller à des propos et des attitudes susceptibles de poursuites pénales, en particulier contre un jeune homme, « le seul Noir du groupe », précise l’un des jeunes gens interpellés. Plusieurs d’entre eux ne se connaissaient pas avant cet épisode.
« Tu sais que tu as une vraie tête à claques ? », lui dit un policier, tandis qu’à l’arrière-plan sonore des voix réclament des précisions sur le nombre de personnes interpellées. « Si tu veux, je te prends tout seul », continue le policier, avant d’intimer le silence au jeune homme, qui tente de répondre : « Ferme ta gueule. »
« Efface ton sourire »
Les propos de plusieurs fonctionnaires, très nettement audibles, sans que le moindre doute soit possible quant à la qualité de ceux qui les profèrent, sont prononcés sur le même ton, alternant menaces, intimidations, menus propos sur les aptitudes des interpellés à la boxe et fanfaronnades guerrières. Ainsi, cinq minutes et quarante secondes après le début de l’enregistrement, l’un des policiers se laisse aller : « T’as tellement de chance d’être assis là, maintenant qu’on t’a interpellé, je te jure, je te pétais les jambes, au sens propre… Je peux te dire qu’on en a cassé, des coudes et des gueules (…), mais toi, je t’aurais bien pété tes jambes. »
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